Solidarité

Une intervenante au commissariat pour aider les victimes de violences conjugales

Avec son intervenante sociale en commissariat et gendarmerie (ISCG), Drancy renforce l'accompagnement pour les femmes en situation de souffrance. Une travailleuse sociale qui est souvent la première à recueillir la parole de celles pour qui le silence est le seul refuge.

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Sa présence à Drancy ne tient en rien du hasard. Elle a été voulue par Aude Lagarde, l’une des 4 femmes maires dans un département qui en compte 40 et qui enregistrait en 2019 cinq féminicides sur son territoire. Aucune des victimes n’avait osé porter plainte. C’est dans ce contexte qu’un poste d’intervenante sociale en commissariat et gendarmerie a été créé à Drancy.

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Intervenante sociale en commissariat

Une écoute de proximité

Parmi ses missions, la prévention et la lutte contre les violences intrafamiliales, notamment conjugales, à travers l’accueil, l’écoute, l’évaluation et l’orientation des victimes. Un service public gratuit, confidentiel et anonyme. "Nous sommes comme une porte d’entrée au commissariat [...]. En matière de violences conjugales, nous avons souvent affaire à des victimes qui ne veulent pas se rendre au commissariat", explique Nacera Maloum, intervenante sociale à Drancy. Tous les échanges n’ont pas lieu au commissariat. Elle n’hésite pas à se déplacer à domicile "tant que ma sécurité personnelle n’est pas menacée". D’autres victimes préfèrent s’en tenir à des échanges téléphoniques ou par sms. Une flexibilité qui permet à l’ISCG de tisser des liens de confiance avec elles.

Conseiller sans pousser à la plainte

"Il faut souvent plusieurs échanges avant qu’une victime ne se décide à porter plainte", constate l’intervenante sociale. "Mais je n’interviens pas dans la procédure judiciaire", précise- t-elle. Des échanges au cours desquels elle rappelle aux victimes quels sont leurs droits et comment les mettre en œuvre, sans jamais pousser au dépôt de plainte. Les victimes y sont souvent réticentes et préfèrent déposer une simple main courante. La plupart ignorent que le ministère de l’Intérieur a mis un terme à ce dispositif cet été, afin d’encourager les victimes à porter directement plainte. Pourtant "en première intention, certaines femmes sont réticentes à cette idée", déplore Nacera Maloum. En cause, la peur de perdre leur logement, la garde de leurs enfants ou même leur droit à vivre en France.

Des réalités sociales difficiles

Une peur qui trouve son origine dans des réalités sociales souvent difficiles. Certaines femmes sont arrivées en France à la faveur d’un regroupement familial. Face à un mari violent ou menaçant dans un pays dont elles ne parlent pas la langue, elles n’ont ni soutien familial, ni indépendance financière. L’emprise de leur conjoint est totale et pour peu que des enfants s’ajoutent à l’équation, elles se retrouvent rapidement paralysées par les menaces qui leur sont faites et leur ignorance des lois censées les protéger. C’est ainsi que Nacera Maloum s’est occupée d’une femme dont le conjoint refusait de lui signer les papiers nécessaires au renouvellement de son titre de séjour tant qu’elle ne se prostituait pas. Dans ce contexte, l'intransigeance de la machine administrative n’aide pas. Aujourd’hui, il est impossible pour une femme de faire une demande de logement social tant que son mari est lui-même titulaire d’un bail social.

À l’échelle gouvernementale, il y a peut-être là un levier à activer afin de favoriser l’indépendance de ces femmes, et pourquoi pas, en faire les bénéficiaires prioritaires des logements sociaux vacants ? En attendant, la Ville pare au plus pressé et a mis en œuvre le dispositif de relogement d’urgence, Réagir. Une solution qui a permis en 2020 de mettre à l’abri une quinzaine de Drancéennes.